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[BILLET] Patchs Day One : l’inachevé comme normalité ?

 

Si vous avez une console de dernière génération, vous savez probablement de quoi ce billet va parler. On achète un jeu, on rentre chez soi, on insère la galette dans ladite console, et là : “Bonjour, votre jeu n’est pas à jour, mais ne vous inquiétez-pas, dans seulement 8 Go, vous pourrez en profiter pleinement !”. 

Avant d’aller plus en avant sur ce procédé, il est tout de même bon de se remettre en contexte. Comme tout a une raison (bonne ou mauvaise), nous allons essayer d’expliquer pourquoi ces jeux, que nous payons 70€, parfois plus, parfois moins, nous obligent à installer des mises à jour imposées à l’achat.

“Le jeu est-il moins bon si on ne l’installe pas ? Est-ce que j’achète de base un jeu bugué ? Est-ce qu’on me prend pour un con ?”

Si vous n’avez pas encore réalisé que toutes les réponses à ces questions sont “oui”, c’est que ce billet va peut-être vous aider à y voir plus clair.

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“Les 10 règles d’un blockbuster en 2016 !” (cliquez pour accéder)

Pourquoi aucun jeu n’est à jour à sa sortie ?

Premièrement, il bon de préciser que le patch Day One, comme beaucoup de choses dans l’univers vidéoludique, à une histoire. Dans des temps pas si lointains que cela, le désormais célèbre patch avait une réelle utilité. En effet, les planning et autres dates limites imposés aux développeurs étant souvent très court, il n’était pas si facile de respecter les délais sans un minimum de casse (et attention, je parle bien de minimum).

Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’en ce temps, un jeu pouvait avoir quelques bugs graphiques, techniques, sonores, et autres, il fallait un “temps” supplémentaires aux créateurs afin de pouvoir corriger ces problèmes sans enfreindre ce timing pesant. Avec l’avènement de l’internet, et de plus en plus de monde connectés en permanence, proposer au téléchargement un patch corrigeant ces défauts était donc une idée parfaite. Celui-ci est proposé gratuitement, et pèse quelques centaines de méga-octets tout au plus.

Voilà donc une des raisons dirons-nous “officielle” sur la sortie de ces patchs. Ils sont développés afin de laisser un temps bonus aux programmeurs afin de peaufiner le jeu, pour qu’il soit le plus irréprochable possible lors de sa sortie.

Donc, entre “ce temps-là” et aujourd’hui, qu’est-ce qui a changé ? La raison initiale ? Non, les patchs sont toujours là pour corriger les jeux et les bugs… Mais quoi alors ? Tout simplement : l’argent (ne gueulez pas tout de suite, je m’explique) !

Date de sortie et fiscalité

On va parler graphique un peu. Je vais vous demander d’analyser correctement le graphique ci-dessous qui représente les meilleures ventes de jeux vidéo au cours de l’année 2015, et je vais vous demander de trouver un point commun entre tous ces jeux !

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Alors, vous avez trouvé le point commun ?

En regardant attentivement, on peut effectivement s’apercevoir d’une chose : les jeux sortent souvent en fin d’année. Bien entendu, la raison est la période des fêtes de noël, où les ventes sont légèrement boostées. Cependant, saviez-vous que les 3 derniers mois de l’année ne sont pas forcément les plus vendeurs ? Par exemple, il est de coutume que les éditeurs connaissent un pic de vente au cours du mois de mars (étonnant, non ?).

Il faut bien comprendre une chose : le calendrier est un des pires ennemi des studios, car il y a tout un tas de paramètres à prendre en compte. Il faut savoir que ce que l’on nomme les jeux “AAA”, donc les gros blockbusters, ne sont pas à la portée de tous. En effet, il faut une équipe conséquente et des moyens financiers tout aussi important pour commercialiser ce genre de jeu. Pourquoi était-il plus intéressant de lancer The Witcher 3 en mai plutôt qu’au noël dernier ? La question se pose, puisque avec l’aide de ces fameux Patchs Day One, le jeu aurait très pu être avancé et corrigé par la suite !

La réponse est assez simple. CD Projekt Red, le studio, après avoir investi une somme monstrueuse dans le jeu, du temps, de l’énergie et de la volonté, savait pertinemment qu’en période de fête, le succès du jeu aurait été amoindri en sortant aux côtés des FIFA, des Call of Duty ou des Assassin’s Creed annuels. Il y a donc, en effet, un côté stratégie marketing qui est de rigueur lorsqu’un jeu sors, mais pas que…

Il y a une autre ombre qui plane dangereusement et annuellement sur les têtes des éditeurs : il s’agit de la clôture de l’année fiscale en cours ! Pour les sociétés japonaises, par exemple, celle-ci se termine tous les ans au mois de mars. Et pour avoir des bilans convaincants, il est hors de question de finir l’année sur une mauvaise note, c’est ainsi que l’on peut voir de grosses sorties de jeu entre février et mars. Si vous vous demandiez : “Pourquoi ils sortent ce jeu en février, et pas deux mois plus tôt pour noël ? C’est pas logique !”, eh bien vous avez désormais la réponse, puisqu’en faisant ça, l’éditeur évite la concurrence des fêtes, et place son jeu dans le dernier trimestre fiscal de l’année, et non pas dans le troisième. Et lorsque l’heure du bilan est venue, au lieu d’avoir une baisse des ventes sur les 3 derniers mois fiscaux, nous avons au contraire une constante régulière tout au long de l’année. Les actionnaires sont content, investissent et la machine repars pour l’année à venir !

Je vous invite maintenant à visionner cette vidéo :

Alors, bien sûr, ne stigmatisons pas et ne généralisons pas, ce n’est pas TOUJOURS comme ça… Mais très souvent quand même…

Et le Patch Day One dans tout ça ?

Ce fameux patch… Eh bien il est là pour… Tadaaaaaa, l’argent ! Et oui, les développeurs connaissent leur travail, on est bien d’accord là-dessus. Les développeurs veulent sortir un jeu complet, achevé et si possible parfait (même si c’est relatif). Un jeu est le bébé des développeurs, et ces derniers engagent un savoir-faire dans le jeu qu’ils créent, ils engagent une réputation et une méthodologie de travail. Pourtant, notez bien que les éditeurs, eux, ne sont pas souvent de cet avis…

En effet, désireux de commercialiser vite, vite, vite, ils décident souvent d’accélérer les choses, et comme ce sont eux qui financent les développeurs, ils ont la mainmise sur eux (fatalement). Cette accélération débute lorsque l’on décide de faire partir le “Gold” (ou Master) en presse. Un jeu terminé est compressé sur un disque, comme vous le savez. Cet exemplaire pour ainsi dire “unique” est nommé “Master”, et du fait de sa couleur dorée, on le surnomme “Gold”. Ce fameux CD est celui qui partira en duplication pour en sortir des milliers et des milliers de copies qui débarqueront dans nos foyers quelques temps plus tard.

Du coup, lorsque un éditeur impose aux développeurs un délai très serré (pour sortir le jeu pendant les fêtes ou avant la clôture de l’année fiscale, par exemple), et bien c’est le branle-bas de combat, car, dans la majorité des cas, le jeu est bien loin d’être terminé. Le CD Master part à la presse, et sortira dans quelques mois. Ce petit laps de temps est donc consacré à développer un patch qui sera délivré aux joueurs le jour de la sortie (Day One) et qui corrigera moult bugs encore présent dans le jeu. Donc, pour répondre à la question, lorsque vous achetez un jeu en magasin le jour de la sortie (et même après donc) : Oui, vous l’achetez incomplet et bugué jusqu’à la moelle !

Si vous avez la chance de profiter d’une connexion internet, vous pourrez “upgrader” votre jeu une fois de retour chez vous, mais la taille de plus en plus importante de ces patchs (en moyenne entre 2 et 6 Gigaoctets) ne vous permettront pas de les télécharger de suite. Ayons également une pensée pour celles et ceux qui n’ont tout simplement pas accès à internet (ou qui ont une connexion ridicule).

Parce que si, au début, les patchs étaient bel et bien présentés comme de légers correctifs mineurs, désormais, ils incluent carrément des modes entiers. Ainsi, Street Fighter V, dont les  défis n’étaient pas présents au lancement du titre, s’est vu gratifier d’un mode complet dans une simple mise à jour. Mais peut-on encore parler de mise à jour ? Ne serait-ce pas plutôt une sorte de Season Pass, pour lequel nous payons le prix fort un produit inachevé ?

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“Les 10 règles d’un blockbuster en 2016 !” cliquez pour accéder

Comment réduire cette pratique ?

Si vous ne me connaissez pas, sachez que je suis un éternel optimiste doublé d’un idéaliste. Cela ne m’empêche pas pour autant d’être rationnel. Afin de réduire au maximum il faut changer deux choses cruciales. La première est, bien entendu, la pression des éditeurs envers les développeurs. Laissez-les respirer bordel, laissez-les faire ce qu’ils veulent et ayez foi en eux. Ça ne sera peut être pas parfait, ni ultra-vendeur, mais adopter cette politique vous donnera la confiance des fans, et il n’y a qu’à observer le vénéré Nintendo pour comprendre que cette politique fonctionne.

La deuxième chose à changer, c’est… nous ! Nous joueurs ! Les joueurs sont exigeants, ils gueulent contre le downgrade graphique, ils gueulent contre les DLC, ils gueulent contre les reports, les choix, les dates, les prix… Et malheureusement, sur internet, ceux qui gueulent sont ceux qui se manifestent le plus, et ceux qui aiment sont ceux qui soutiennent en secret sans véritablement se montrer au grand jour (les soirées bières/canapés ne comptent pas).

Parce que, pour autant, malgré la gueulante générale, dites-vous bien que si DLC il y a (par exemple) c’est que DLC se vend, et se vend même très bien ! Vous n’avez pas tout saisi ? Ok, je la fait en plus courte : Si merde il y a, c’est que merde nous consommons ! Privilégions la qualité à la quantité annuelle, refusons de déboursez 20€ pour des packs de 3 cartes supplémentaires. The Witcher 3 vous propose des extensions à 10~15€ pour vous rajouter 20h de jeu : ne trouvez-vous pas ce ratio beaucoup plus respectueux dans la relation joueurs/développeurs ? Vous voulez acheter un pack de tenues pour votre J-RPG favori ? Allez plutôt vers ce petit studio indépendant qui vous proposera une expérience bien plus enrichissante et ludique !

Attention, il ne faut pas généraliser pour autant, je fais parti de la communauté JV, je m’inclut donc dans le lot, car il n’est pas question ici de rassembler ou d’exclure ceux qui sont d’accord/pas d’accord, mais plutôt de débattre entre nous, pour essayer de comprendre pourquoi en 2016, avec les technologies actuelles, nous achetons des jeux inachevés, c’est une formidable chance d’initier le débat et, qui sait, dans quelques temps, les choses auront peut être changées grâce à nous…

Car aujourd’hui, l’inachevé est notre normalité, dans le média comme dans les relations de notre communauté !

Ce billet ne représente que mon avis, il n’est en aucun cas un discours unique et inattaquable !

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